Trump, l’inflation et le dollar
Les politiques économiques de l’administration Trump pourraient accélérer – sans doute modérément - l’inflation et, simultanément, renforcer l’appréciation du dollar ce qui menacerait la stabilité financière des pays émergents.
Par Christophe Destais
Le Président Trump et son entourage ont annoncé leur intention de mettre en œuvre des politiques économiques qui, pour l’essentiel, combinent un soutien budgétaire à la croissance - à la fois par des dépenses d’infrastructures et des réductions d’impôts bénéficiant aux contribuables les plus fortunés - et des politiques de restriction à l’entrée des marchandises et des migrants sur le territoire des Etats-Unis.
Il est bien sûr très difficile d’imaginer quelle sera la consistance précise des mesures qui seront prises. L’essentiel devra passer par la moulinette d’un Congrès dominé par des Républicains plutôt favorables au libre échange et à la réduction des finances publiques. Mais, il faudra - pour ces derniers - prendre en compte la dynamique politique créée par l’élection de Donald Trump et les bénéfices immédiats que leurs électeurs pourraient trouver à ces politiques en matière de réduction d’impôt, de financement d’infrastructures ou, éventuellement, d’emplois.
Il est donc probable que la nouvelle administration sera en mesure de mettre en place au moins une partie de son programme. Quelles pourraient en être les conséquences?
Une politique de taxes aux frontières très élevées, ciblées uniquement sur certains pays, aurait sans doute comme effet - comme l’a montré une récente étude du CEPII pour le cas de l’automobile - de déporter une partie de l’activité vers des pays où, secteur par secteur, la productivité est la plus élevée (du Mexique vers la Corée ou le Japon, dans le cas de l’automobile), où vers les Etats-Unis eux-mêmes. Dans les deux cas, le prix des biens pour les consommateurs américains devrait – à taux de change constant - augmenter et, donc, contribuer à stimuler l’inflation. Un effet similaire serait sans doute à attendre d’une réforme de l’impôt sur les sociétés, en projet depuis longtemps mais qui pourrait aboutir rapidement et dont l’effet serait de pénaliser les dépenses d’importation, qui ne seraient plus déductibles des profits des entreprises.
Un effet similaire sur les prix, de plus grande ampleur, est à attendre d’un plan de stimulation budgétaire massif de l’économie. Après plus de 7 années de croissance qui ont suivi la crise financière, l’économie semble fonctionner à son plein potentiel. La croissance n’a pas été aussi forte que lors des cycles précédents mais la durée (30 trimestres) est assez longue. 14,2 millions d’emplois ont été créés (il y avait eu 7,2 destructions pendant la crise) et, à 4,7 %, le taux de chômage est tombé à un niveau voisin de celui auquel les précédents retournements de conjonctures se sont produits. Il existe toutefois un débat pour savoir s’il n’y aurait pas une réserve de chômeurs découragés qui ne sont pas comptabilisés mais qui seraient disposés à occuper un emploi si l’occasion se présente. La diminution du taux d’activité de la population (il est passé de 83 % à 81 % pour la population âgée de 25 à 54 ans) pourrait, par exemple, plaider en faveur de cet argument. Si c’était le cas, l’impact d’une relance budgétaire sur la hausse du coût du travail et donc, les prix, serait limité. L’opinion qui prévaut chez les économistes américains est toutefois que l’employabilité de ces chômeurs découragés est très faible et qu’ils sont donc peu susceptibles de satisfaire des besoins d’emplois, même assez peu qualifiés. Ainsi, le taux d’activité a commencé à baisser dès la fin des années 90.
La politique commerciale et la politique budgétaire de la nouvelle administration auraient donc, l’une et l’autre, pour conséquence de stimuler l’inflation qui est restée relativement stable depuis la fin de 2012 entre 1,4 % et 1,9 %, pour la mesure à laquelle la FED se réfère le plus volontiers (déflateur des dépenses de consommation dans le PIB, hors énergie et produits alimentaires).
Une inflation accrue devrait logiquement favoriser une accélération de l’augmentation des taux d’intérêt au jour le jour déjà entamée par la FED. En retour, cela aurait pour conséquence de limiter la poussée inflationniste. Un fort accroissement du déficit budgétaire pèserait également sur les taux d’intérêt à moyen et long terme.
L’augmentation des taux aurait pour conséquence une appréciation du dollar dans une logique voisine de celle que les Etats-Unis avaient connus au début des années 80. Cette appréciation atténuerait l’effet inflationniste des politiques commerciales mais également l’incitation des ménages américains à consommer les produits « made in USA » et donc, l’efficacité des restrictions commerciales que mettrait en œuvre la nouvelle administration.
L’appréciation du dollar pourrait avoir une autre conséquence. Elle compromettrait encore davantage la capacité des entreprises des pays émergents endettées en dollar à rembourser cette dette, au sujet de laquelle les institutions financières internationales ont exprimé leur inquiétude[1], et pourrait générer des turbulences financières profondes, quoique d’une ampleur difficile à mesurer aujourd’hui.
Il est bien sûr très difficile d’imaginer quelle sera la consistance précise des mesures qui seront prises. L’essentiel devra passer par la moulinette d’un Congrès dominé par des Républicains plutôt favorables au libre échange et à la réduction des finances publiques. Mais, il faudra - pour ces derniers - prendre en compte la dynamique politique créée par l’élection de Donald Trump et les bénéfices immédiats que leurs électeurs pourraient trouver à ces politiques en matière de réduction d’impôt, de financement d’infrastructures ou, éventuellement, d’emplois.
Il est donc probable que la nouvelle administration sera en mesure de mettre en place au moins une partie de son programme. Quelles pourraient en être les conséquences?
Une politique de taxes aux frontières très élevées, ciblées uniquement sur certains pays, aurait sans doute comme effet - comme l’a montré une récente étude du CEPII pour le cas de l’automobile - de déporter une partie de l’activité vers des pays où, secteur par secteur, la productivité est la plus élevée (du Mexique vers la Corée ou le Japon, dans le cas de l’automobile), où vers les Etats-Unis eux-mêmes. Dans les deux cas, le prix des biens pour les consommateurs américains devrait – à taux de change constant - augmenter et, donc, contribuer à stimuler l’inflation. Un effet similaire serait sans doute à attendre d’une réforme de l’impôt sur les sociétés, en projet depuis longtemps mais qui pourrait aboutir rapidement et dont l’effet serait de pénaliser les dépenses d’importation, qui ne seraient plus déductibles des profits des entreprises.
Un effet similaire sur les prix, de plus grande ampleur, est à attendre d’un plan de stimulation budgétaire massif de l’économie. Après plus de 7 années de croissance qui ont suivi la crise financière, l’économie semble fonctionner à son plein potentiel. La croissance n’a pas été aussi forte que lors des cycles précédents mais la durée (30 trimestres) est assez longue. 14,2 millions d’emplois ont été créés (il y avait eu 7,2 destructions pendant la crise) et, à 4,7 %, le taux de chômage est tombé à un niveau voisin de celui auquel les précédents retournements de conjonctures se sont produits. Il existe toutefois un débat pour savoir s’il n’y aurait pas une réserve de chômeurs découragés qui ne sont pas comptabilisés mais qui seraient disposés à occuper un emploi si l’occasion se présente. La diminution du taux d’activité de la population (il est passé de 83 % à 81 % pour la population âgée de 25 à 54 ans) pourrait, par exemple, plaider en faveur de cet argument. Si c’était le cas, l’impact d’une relance budgétaire sur la hausse du coût du travail et donc, les prix, serait limité. L’opinion qui prévaut chez les économistes américains est toutefois que l’employabilité de ces chômeurs découragés est très faible et qu’ils sont donc peu susceptibles de satisfaire des besoins d’emplois, même assez peu qualifiés. Ainsi, le taux d’activité a commencé à baisser dès la fin des années 90.
La politique commerciale et la politique budgétaire de la nouvelle administration auraient donc, l’une et l’autre, pour conséquence de stimuler l’inflation qui est restée relativement stable depuis la fin de 2012 entre 1,4 % et 1,9 %, pour la mesure à laquelle la FED se réfère le plus volontiers (déflateur des dépenses de consommation dans le PIB, hors énergie et produits alimentaires).
Une inflation accrue devrait logiquement favoriser une accélération de l’augmentation des taux d’intérêt au jour le jour déjà entamée par la FED. En retour, cela aurait pour conséquence de limiter la poussée inflationniste. Un fort accroissement du déficit budgétaire pèserait également sur les taux d’intérêt à moyen et long terme.
L’augmentation des taux aurait pour conséquence une appréciation du dollar dans une logique voisine de celle que les Etats-Unis avaient connus au début des années 80. Cette appréciation atténuerait l’effet inflationniste des politiques commerciales mais également l’incitation des ménages américains à consommer les produits « made in USA » et donc, l’efficacité des restrictions commerciales que mettrait en œuvre la nouvelle administration.
L’appréciation du dollar pourrait avoir une autre conséquence. Elle compromettrait encore davantage la capacité des entreprises des pays émergents endettées en dollar à rembourser cette dette, au sujet de laquelle les institutions financières internationales ont exprimé leur inquiétude[1], et pourrait générer des turbulences financières profondes, quoique d’une ampleur difficile à mesurer aujourd’hui.
[1] Voir, en particulier, les récentes publications de la Banque des Règlements Internationaux à ce sujet : Robert Neil McCauley, Patrick McGuire and Vladyslav Sushko « Dollar credit to emerging market economies » 6 December 2015 « The risk-taking channel looms large for EMEs » in «The global economy: realignment under way? » 26 June 2016 , Hyun Song Shin « Global liquidity and procyclicality » World Bank conference, “The state of economics, the state of the world” Washington DC, 8 June 2016.