Le projet de loi des finances du budget 2013 sera présenté demain
Retranscription écrite de l'émission du 27 septembre "Les idées claires d'Agnès Bénassy Quéré", chronique hebdomadaire sur France Culture le jeudi matin à 7h38.
Par Agnès Bénassy-Quéré
Chers auditeurs, la journée avait pourtant bien commencé : café, tartines, radio. Hélas, voici votre rabat-joie. Il faut dire que c’est demain que sera présenté le projet de loi de finances pour 2013, autrement dit le menu des coupes budgétaires et des hausses d’impôts. On en connaît déjà les grandes lignes : 20 milliards d’impôts supplémentaires et 10 milliards de dépenses en moins. En tout, donc, 30 milliards, 1,5% du PIB, destinés à ramener l’an prochain le déficit à 3% de ce même PIB, conformément à nos engagements européens.
On peut s’interroger sur la pertinence d’un resserrement budgétaire au moment même où l’activité plonge : en réduisant les dépenses et le pouvoir d’achat, le gouvernement ne va pas ralentir la chute. Néanmoins ce débat sur la stratégie budgétaire d’ensemble doit être mené au niveau européen, non au niveau national. Ce sera l’objet d’une autre chronique. Aujourd’hui, nous allons plutôt nous interroger sur la répartition de l’effort : 1/3 de baisse de dépenses, 2/3 de hausses d’impôts, est-ce le bon cocktail ?
La réponse traditionnelle à cette question est non : les travaux réalisés dans les années 1990 suggèrent que la réduction du déficit est plus efficace et plus durable si elle repose sur une réduction des dépenses que si elle est obtenue à coups de hausses d’impôts. Toutefois, des études plus récentes – dont une du très sérieux FMI - viennent battre en brèche ce résultat. Tout d’abord, les coupes dans les dépenses sont plus pénalisantes pour la croissance que les hausses d’impôts. Cela se comprend aisément : si l’Etat renonce à un projet d’investissement, il annule des commandes à des entreprises : l’impact sur la demande est direct ; tandis que s’il augmente les impôts, certes il réduit le pouvoir d’achat, mais il peut encore espérer que les Français puiseront dans leurs bas de laine pour maintenir leur niveau de consommation. Cet argument est particulièrement percutant aujourd’hui où le multiplicateur keynésien (celui qui transforme des euros de dépenses publiques en euros de PIB) est considéré comme élevé, notamment parce que les taux d’intérêt sont au plancher. Par ailleurs, des coupes budgétaires réalisées à la va-vite risquent de dégrader les services publics (et donc les conditions de la production), ou bien de n’être pas durables. D’où l’idée d’amorcer l’ajustement avec une combinaison de réductions de dépenses et de hausses d’impôts, le temps d’imaginer une manière intelligente de réduire plus nettement les dépenses. Mais il faut engager au plus vite cette réflexion de fond, afin de montrer aussi bien aux contribuables qu’aux marchés financiers la détermination du gouvernement à réduire la dépense, au-delà même du budget 2013, et de bénéficier de leur confiance même si, par malheur, une aggravation de la crise faisait déraper les finances publiques en 2013.
Chers auditeurs, un gouvernement prudent en vaut deux. S’il rate la cible des 3%, il lui faudra prouver autrement son sérieux. Et croyez-moi, nos partenaires européens ont plein d’idées austères à nous proposer. Alors, n’attendons pas que la troïka nous dicte la prochaine réforme des retraites.
On peut s’interroger sur la pertinence d’un resserrement budgétaire au moment même où l’activité plonge : en réduisant les dépenses et le pouvoir d’achat, le gouvernement ne va pas ralentir la chute. Néanmoins ce débat sur la stratégie budgétaire d’ensemble doit être mené au niveau européen, non au niveau national. Ce sera l’objet d’une autre chronique. Aujourd’hui, nous allons plutôt nous interroger sur la répartition de l’effort : 1/3 de baisse de dépenses, 2/3 de hausses d’impôts, est-ce le bon cocktail ?
La réponse traditionnelle à cette question est non : les travaux réalisés dans les années 1990 suggèrent que la réduction du déficit est plus efficace et plus durable si elle repose sur une réduction des dépenses que si elle est obtenue à coups de hausses d’impôts. Toutefois, des études plus récentes – dont une du très sérieux FMI - viennent battre en brèche ce résultat. Tout d’abord, les coupes dans les dépenses sont plus pénalisantes pour la croissance que les hausses d’impôts. Cela se comprend aisément : si l’Etat renonce à un projet d’investissement, il annule des commandes à des entreprises : l’impact sur la demande est direct ; tandis que s’il augmente les impôts, certes il réduit le pouvoir d’achat, mais il peut encore espérer que les Français puiseront dans leurs bas de laine pour maintenir leur niveau de consommation. Cet argument est particulièrement percutant aujourd’hui où le multiplicateur keynésien (celui qui transforme des euros de dépenses publiques en euros de PIB) est considéré comme élevé, notamment parce que les taux d’intérêt sont au plancher. Par ailleurs, des coupes budgétaires réalisées à la va-vite risquent de dégrader les services publics (et donc les conditions de la production), ou bien de n’être pas durables. D’où l’idée d’amorcer l’ajustement avec une combinaison de réductions de dépenses et de hausses d’impôts, le temps d’imaginer une manière intelligente de réduire plus nettement les dépenses. Mais il faut engager au plus vite cette réflexion de fond, afin de montrer aussi bien aux contribuables qu’aux marchés financiers la détermination du gouvernement à réduire la dépense, au-delà même du budget 2013, et de bénéficier de leur confiance même si, par malheur, une aggravation de la crise faisait déraper les finances publiques en 2013.
Chers auditeurs, un gouvernement prudent en vaut deux. S’il rate la cible des 3%, il lui faudra prouver autrement son sérieux. Et croyez-moi, nos partenaires européens ont plein d’idées austères à nous proposer. Alors, n’attendons pas que la troïka nous dicte la prochaine réforme des retraites.