Le blog du CEPII

Chine : la fin des illusions économiques

Conséquences de la stratégie zéro Covid, crise de l’immobilier, place dans les échanges commerciaux internationaux : les signes d’un essoufflement du modèle économique chinois s’accumulent et la foi en une croissance forte vacille.
Par Sébastien Jean
 Audio du 26 septembre 2022 - Dans les médias


  00:58:16

Discussion avec :

Mary-Françoise Renard (Economiste, professeure à l’université Clermont-Auvergne, responsable de l’Institut de recherches sur l’économie de la Chine (IDREC)), Georgina André (Géographe, chercheuse associée à l’université Paris 1-Panthéon Sorbonne), Sébastien Jean (Economiste, chercheur associé au CEPII et directeur de recherches à l’INRAE).
 
 

À une vingtaine de jours de l’ouverture du XXème Congrès du Parti, les signes de tensions s’accumulent pour l’économie chinoise. Si certains sont très conjoncturels, comme la sécheresse qui vient frapper une partie du pays, d’autres sont le résultat de politiques menées depuis plusieurs mois : la stratégie zéro Covid a un coût élevé. Si la Chine reste la deuxième puissance économique mondiale, très loin devant le Japon, le modèle économique sur lequel reposait sa croissance semble arriver à bout de souffle, marquant la fin de nombreuses illusions : la bulle immobilière éclate, la confiance dans la capacité du pays à renouer avec une croissance forte s’érode, et c’est tout un système qui vacille.

Selon Mary-Françoise Renard "pour bien comprendre la situation, il faut se souvenir que le taux de croissance de l'économie chinoise ne peut pas être interprété comme on a l'habitude d'interpréter le taux de croissance de la France.  Ce n'est pas un taux qui est observé en fin d'année, correspondant à la croissance de l'économie. C'est un taux qui est décidé par le gouvernement chinois, en partie à partir de la réalité de l'économie mais pas seulement, et ensuite tous les acteurs de l'économie vont agir pour réussir à obtenir ce taux de croissance. Le moyen pour obtenir un très fort taux de croissance a été l'investissement, mais il arrive un moment ou l'investissement n'est plus productif. L'économie ne peut pas absorber de façon positive les résultats de cet investissement. Aujourd'hui, il y a une croissance quantitative surestimée qui n'est pas qualitative, les problèmes de l'économie chinoise sont structurels après le rattrapage de l'économie chinoise".

Par ailleurs, la Chine fait face à une crise immobilière, Georgina André précise que "le gouvernement chinois mise beaucoup sur l'économie territoriale, c’est-à-dire sur la capacité des municipalités à générer du développement économique. On a vu beaucoup de petites villes avoir des méga projets d'équipements très structurants, d'opéra, voire de  quartiers d'affaires, alors qu'effectivement elles n'en avaient pas la population, qu'elles n'avaient pas des prévisions d'attractivité démographiques extrêmement fortes et qu'effectivement la population dispose de moins de revenue disponible pour pouvoir acheter ces logements. Et donc je pense qu'il y a cette absence de choix en fait sur ces inégalités territoriales par le gouvernement chinois qui effectivement contribue aussi à alimenter cette crise immobilière généralisée".

Face au ralentissement, un plan d'investissements dans les infrastructures de 1000 milliards de dollars vient d'être annoncé par le régime chinois. Selon Sébastien Jean "il y a une volonté politique du gouvernement de conserver un niveau de croissance extrêmement élevé qui ne correspond pas aux fondamentaux de ce que l'économie chinoise peut vraiment fournir comme croissance. Cette augmentation du crédit qui n'est pas et qui n'est pas soutenable à terme. Aujourd'hui, la Chine est à un niveau de pays de richesse intermédiaire, et donc le défi c'est d'arriver à changer de type de croissance parce qu'elle ne peut plus s'appuyer sur les réallocations, maintenant, ce qu'il faut pour vraiment maintenir une croissance soutenue, c'est de l'innovation.


Ces article et podcast sont republiés à partir de Radio France. Découvrez le podcast original.
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